Jordi Savall, musicien de la paix

Le réalisateur Benjamin Bleton rend hommage au travail pour la Paix de Jordi Savall et dresse un portrait intime du musicien catalan, expert de la viole de gambe.

Critique : Après deux mille ans d'une culture de guerre, il serait grand temps de construire une culture de paix, par la musique, revendique Jordi Savall. Avec un sens vertigineux de la magie sonore, il convoque les musiques orientales et séfarades dans ses concerts classiques, tradition savante issue de l'écrit et tradition orale sur un pied d'égalité, dans un vrai dialogue. Le mot tolérance, avec sa connotation condescendante d'un Occident « acceptant » l'autre, fait horreur à Jordi Savall, surtout quand il rappelle tout ce que notre univers ­instrumental doit à l'Orient, à la Perse, à l'Egypte, dès le viie siècle. Au sein de son ensemble instrumental, il mélange des musiciens de toutes confessions, qui surmontent leurs blessures encore vives pour parvenir à une harmonie sonore. Et si cette utopie de paix fonctionne à petite échelle, tout est possible. Enfin, quand les bombes se seront tues, car la ­musique a besoin de silence pour sonner, admet-il. Pas de grandes phrases chez ce beau personnage, mais des convictions défendues au quotidien avec une grande sérénité. Romance séfarade ; mélodie chantée en grec, en arabe et en hébreu ; vertigineux percussionnistes afghans ; une chanson rappelant les horreurs de Sarajevo ; l'Espagnol Joan Cabanilles et l'Estonien Arvo Pärt : chaque extrait de concert illustrant ces propos si simples est un hymne à la fraternité. Ensorcelant. Un beau moment d'écoute mutuelle. — Bernard Mérigaud

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