Maurice Utrillo et Suzanne Valadon - Un duo infernal

Suzanne Valadon et Maurice Utrillo, une mère et son fils, sont deux peintres emblématiques de la vie de bohème parisienne, l'un visionnaire et l'autre avant-gardiste.

Critique : Suzanne Valadon et Maurice Utrillo. Mère et fils. Tous deux nés bâtards. Tous deux peintres unis par une relation fusionnelle destructrice, ici explorée avec finesse psychologique au détriment, parfois, d'un peu plus de profondeur et d'analyse sur le plan pictural — cette fameuse école de Paris, juste effleurée. Elle est le modèle et l'amante de Puvis de Chavanne, de Renoir et de Toulouse-Lautrec, auprès desquels, seule, instinctivement, elle développe un trait pour le dessin qui enchantera Degas : « Vous êtes des nôtres ! » lui déclare d'emblée ce fidèle acheteur. Lui est alcoolique, violent, déifie cette sainte mère, « la plus grande lumière picturale du siècle ». Elle déploie un tempérament de feu, libre, dans un Montmartre de bohème. Il vit reclus entre ses internements et sa chambrette, dans laquelle, à partir de cartes postales, il peint les rues des lieux dans lesquels sa mère s'épanouit, mais représente des perspectives vides, parfois peuplées de silhouettes fantomatiques, telles des spectres. Le jour où Utrillo se fait, enfin, un copain, Suzanne le met dans son lit et l'épouse. Et dans cette relation fusionnelle, parfois glauque, presque carcérale pour le protéger de lui-même, Utrillo ne cesse de produire, triomphe auprès des acheteurs. Sa mère, incapable de mots d'amour et de reconnaissance, réalise des portraits de son fils en peintre confirmé. Lui, à la signature de ses propres tableaux, ajoute un V final. V, comme Valadon... — Bernard Mérigaud

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